Fondations, réseaux, fonds de dotation… : comment évaluer son impact en tant qu’accompagnateur ?
L’évaluation d’impact social se révèle être un véritable enjeu pour tous les accompagnateurs de structures à impact : fondations, réseaux, fonds de dotation, financeurs, incubateurs ou accélérateurs d’entreprises… que ce soit pour objectiver leur impact, s’assurer de l’atteinte de leur mission sociale, sensibiliser les acteurs qu’ils accompagnent à la mesure d’impact ou encore pour identifier des leviers d’action pour leur propre compte.
Si en tant qu’accompagnateur de structures à impact vous réalisez une évaluation d’impact, deux questions supplémentaires par rapport aux structures porteuses de projet sont à prendre en compte : quel impact, direct ou indirect, mesurer ? Quel type d’indicateurs retenir selon ses contraintes et enjeux ?
Delphine Santini, chargée de mission et responsable de la mesure d’impact que la Fondation AÉSIO réalise, témoigne sur les enjeux de leur évaluation d’impact. Créée en 2021 et accompagnée depuis par Improve, la Fondation AÉSIO soutient des structures d’intérêt général qui agissent en faveur de la sensibilisation au bien-être mental, de la prévention en termes de santé mentale et de l’accompagnement auprès des personnes en souffrances psychiques :
« L’idée de notre mesure d’impact est de s’assurer que les propositions faites à nos porteurs de projets sont pertinentes. Par exemple, quand on propose un accompagnement vidéo de qualité professionnelle à nos porteurs de projets, on veut s’assurer qu’il y a un vrai impact, que ça leur est vraiment utile : est-ce que ça leur a donné plus de visibilité ? Est-ce qu’ils ont eu plus de facilité à toucher de nouveaux mécènes ? On essaie de concrétiser les engagements qu’on prend auprès d’eux. »
1. Mesurer son impact direct et/ou indirect : comment choisir ?
Dans le cadre d’une évaluation d’impact social, les étapes de rédaction du cahier des charges restent identiques pour un porteur de projets ou un accompagnateur de structures à impact (voir notre article Le cahier des charges en évaluation d’impact : pour bien faire il faut bien commencer). Cependant, évaluer son impact en tant que fondation, réseau, fonds de dotation, nécessite de considérer d’autres éléments. Aussi, la première question à se poser concerne le type d’impact que l’on souhaite mesurer : direct et/ou indirect.
Pour un accompagnateur, l’impact direct est mesuré auprès des associations soutenues, entreprises accompagnées, etc. ou sur les projets en eux-mêmes. C’est le cas par exemple pour une fondation distributrice – et non opératrice – qui souhaite mesurer son impact direct.
Dans un enjeu d’amélioration de son accompagnement auprès des structures à impact, un accompagnateur préfèrera mesurer ses impacts directs. Ainsi, l’accompagnateur pourra s’assurer de la cohérence de son accompagnement avec les besoins de chaque structure et les faire progresser dans ce sens, comme en témoigne Delphine Santini pour la Fondation AÉSIO (pour en savoir plus sur les projets soutenus par la Fondation AÉSIO) :
« Les retours qu’on a eus sur la première édition de notre évaluation d’impact étaient que les porteurs de projets avaient besoin d’une aide opérationnelle plus ciblée. On a donc décidé de faire certains accompagnements « à la carte », avec, par exemple, l’appui d’un living lab pour modéliser un projet. Ce module, très spécifique, a uniquement été proposé aux lauréats de notre appel à projets sur le numérique. »
Quant à l’impact indirect, il est mesuré auprès des bénéficiaires finaux des projets accompagnés. Le plus souvent, cette évaluation d’impact indirect passe par la mesure des impacts des structures soutenues sur leurs bénéficiaires.
Les accompagnateurs de structures à impact préfèreront mesurer leurs impacts indirects notamment pour s’assurer de l’atteinte de leur mission sociale ou de leur contribution à la résolution d’une problématique.
En pratique...
Mesurer l’impact indirect se révèle souvent plus complexe que l’impact direct. Cela nécessite d’établir une bonne coordination avec les structures accompagnées et un certain degré d’engagement de leur part. C’est le cas notamment pour l’étape de la collecte des données. En effet, les structures accompagnées étant en lien direct avec les bénéficiaires finaux, l’accompagnateur devra nécessairement compter sur elles pour récolter ces données.
2.Indicateurs « transversaux » et indicateurs « par projet » : comment choisir ?
Dans le cadre de son évaluation d’impact, la deuxième question que doit se poser un accompagnateur de structures à impact concerne le type d’indicateurs. En effet, lorsqu’une fondation, un réseau, un fonds de dotation choisit de mesurer son impact indirect, il/elle peut choisir deux types d’indicateurs combinables : les indicateurs transversaux et les indicateurs par projet.
Les indicateurs dits « transversaux » sont des indicateurs de reporting globaux et communs à l’ensemble des structures accompagnées. D’un point de vue pilotage, ce type d’indicateurs permet d’apporter des précisions sur l’orientation stratégique à adopter pour l’accompagnateur. Cependant, il n’est pas toujours possible de trouver des indicateurs communs pour toutes les structures accompagnées. Si les activités ou les publics cibles sont très différents, les indicateurs le seront également.
Les indicateurs dits « par projet » sont des indicateurs de reporting spécifiques à un projet soutenu et permettant de suivre chacun de ses impacts. Ainsi, l’accompagnateur dispose d’informations plus fines pour mieux accompagner la structure concernée et l’aider à progresser. Cependant, cela implique une grande quantité d’indicateurs à mesurer car plus il y a de projets, plus il y a d’indicateurs.
En pratique… comment arbitrer entre indicateurs transversaux et par projet ?
Le choix dans la proportion entre indicateurs transversaux et par projet, repose avant tout sur les enjeux et donc est propre à chaque accompagnateur. Les deux types d’indicateurs présentés – transversaux et par projet – ne s’excluent pas, ils sont même complémentaires. Pour ce faire, chaque accompagnateur peut se questionner : auprès de qui/sur quoi je veux agir (sur mon accompagnement auprès de chaque structure ou sur les projets qu’elles mènent indépendamment) ? À quel point ai-je besoin de ce type d’indicateurs plutôt que de l’autre ? Aussi, il est important de tenir compte de ses contraintes, notamment en termes de faisabilité : est-ce possible pour moi de collecter des données sur ce type d’indicateurs ?
Ce qu’il faut retenir
Dans le cadre d’une évaluation d’impact, quel que soit le statut de l’accompagnateur – fondation, réseau, fonds de dotation, etc. – deux questions se posent : quel type d’impact mesurer (direct et/ou indirect) et quels types d’indicateurs collecter (transversaux et/ou par projet) ?
Pour faire le choix le plus adapté à situation, il faut tenir compte de ses propres besoins et enjeux : est-ce que mon accompagnement correspond aux besoins des structures que j’accompagne ? À quel point ma contribution permet-elle de résoudre une problématique ? Suis-je en mesure de collecter ce type d’indicateurs ? En évaluation d’impact, il ne s’agit pas toujours de faire un choix entre deux ou plusieurs options mais davantage de trouver un équilibre et une combinaison de ces diverses options – lorsque c’est possible.
Le mot de la fin revient à Delphine Santini de la Fondation AÉSIO qui nous rappelle que la mesure d’impact est un outil de valorisation important, à la fois pour les accompagnateurs mais également pour les porteurs de projets :
« L’idée n’est pas de garder sa mesure d’impact dans le fond d’un tiroir mais de se dire « je vais pouvoir l’utiliser pour expliquer concrètement en quoi la fondation a été utile à ces porteurs de projets ». C’est aussi utile d’avoir en tête la manière dont on va partager les résultats et se dire « comment je vais les utiliser demain », je pense aux infographies par exemple. Nous suggérons à nos porteurs de projets des façons d'exploiter et de s'appuyer sur leur mesure d'impact. Valoriser ces résultats, c'est pour un eux un atout et une aide précieuse pour trouver de nouveaux mécènes ! »
Pour citer cet article : Improve, « Fondations, réseaux, fonds de dotation… : comment évaluer son impact en tant qu’accompagnateur ? », mai 2024